Connaissez-vous le diable de Tasmanie ? « Le sarcophile satanique », celui dont la réputation a traversé les continents ? Dont l’appétit rivalise avec celui d’un ogre ?
Lorsque je m’approche de la bête, qui gît à même le sol, je n’en crois pas mes yeux. Le petit animal n’est pas plus gros qu’un chat et présente des allures de bébé ours.
« C’est ça un diable de Tasmanie » lâche Peter. Il n’y a pas vraiment de quoi effrayer un homme. Et pour être honnête, je pensais que le fameux diable n’était rien d’autre qu’une légende !
Le Sarcophilus harrisii, de son nom scientifique, est le plus gros des marsupiaux carnivores. Il peuplait jadis tout le continent australien. Aujourd’hui, on ne le trouve plus qu’en Tasmanie et sa population est en danger.
Au cœur de la Tasmanie
Je suis dans une ferme au cœur de la Tasmanie. J’effectue ma dernière mission pour la préservation de l’environnement en compagnie de Peter, le coordinateur du projet, et d’une équipe de dix personnes, des Coréens pour la plupart.
Lost in translation. La langue dominante est le coréen, mais curieusement, je prends les choses avec une certaine philosophie.
C’est partie pour quinze jour de travail à la coréenne !
Notre mission est simple : enlever une plante envahissante au bord de la rivière, jadis introduite par un Anglais. Généralement le CVA Conservation Volunteers Australia ne travaille que sur des sites protégés, mais il lui arrive de donner un coup de main aux fermiers, notamment à ceux situés en amont d’un cours d’eau pour limiter au maximum l’invasion.
« Good work !» Mon binôme me congratule d’une poignée de main ferme et chaleureuse.
Elle est contente. Nous avons fait du bon travail.
Pause. Nous nous arrêtons… tous en même temps. Continuer à travailler alors que les autres prennent une pause, ou l’inverse, serait mal venu. Cela semble faire partie de leur code que je tente de comprendre au fil des jours.
Nous sommes dans l'”outback” australien, là où les portables ne passent plus, au milieu des champs avec de gigantesques troupeaux et d’énormes corbeaux noirs au croassement cru et sans pitié. L’équipe loge dans une cabane remplie d’araignées, dort sur de vieux matelas poussiéreux. Mais après des regard étonnés à la découverte de ces locaux quelque peu déconcertant de prime abord, la bonne humeur revient aussitôt. Personne ne se plaint de l’inconfort. Et c’est finalement très bien comme ça. D’autant plus que l’accueil de Steph et de son mari, les fermiers, est des plus chaleureux….
Les fermiers de l’outback australien
Stéphanie nous rejoint volontiers le soir alors que nous dégustons sur grande table en bois des spécialités coréennes… forcément très épicées.
De temps à autre, elle nous propose de découvrir la vie nocturne autour de la ferme, les innombrables possums et wallabis qui peuplent les champs la nuit. Nous les apercevons par dizaines à la lueur des phares du van multipliant les virages comme s’il voulait rassembler un troupeau de vaches. Le jeudi, tous les fermiers du coin (deux ou trois) se rassemblent autour du d’un feu de camp pour un grand barbecue. C’est l’occasion de manger du wallabi et d’en apprendre un peu plus sur la vie quotidienne de ces fermiers de l’outback australien. Je discute longuement avec Stéphanie qui a grandi dans une de ses grandes bâtisses encerclées d’immenses champs. Elle ne pourrait pas faire autre chose, avoue-t-elle. « Lorsque je suis sur mon quad en train de rassembler le troupeau » je me sens vivre.
Quant à Caro, si elle n’a pas quitté le mode de vie des fermiers de par son mariage, elle avoue avoir préféré une carrière plus conventionnelle dans l’Education. Elle met en place des cours (Pour tous les niveaux et sur tous les sujets) dans les lieux reculés de la Tasmanie.
Le week-end, l’équipe de volontaires se retrouve dans la petite maison surplombant la baie d’Hobart. C’est le festival des bateaux. Au jardin botanique, la Royale Navy Australienne donne un concert, les jeunes filles ne chantent pas toujours très juste et les marins sont plutôt maladroits lorsqu’ils saluent les familles. Tout cela renferme un charme plutôt désuet. Je reste un moment allongée dans l’herbe, au milieu des familles des marins observant les va-et-vient de chacun. Le lundi soir, le festival se termine par un feu d’artifice tiré au-dessus de la baie.