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Céline Arnal : “Je me suis lancée dans l’aventure en créant Cybelle Planète”

Céline Arnal, vous êtes à l’origine de la création de l’association Cybelle Planète. Quelles étaient vos motivations ?

Je suis passionnée depuis toujours par la nature, je voulais donc naturellement en faire mon métier. Après l’obtention de mon doctorat en océanologie, j’ai travaillé pour divers instituts de recherche. Ce travail était très passionnant, mais je ressentais le besoin d’en faire plus pour la biodiversité. Mes multiples séjours en pays anglo-saxon m’ont fait découvrir l’écovolontariat et la force d’action que peut représenter l’écologie participative pour la préservation de la biodiversité. Devant le manque d’offres en France dans ce domaine, j’ai décidé, avec quelques amis, de me lancer dans l’aventure en créant l’association Cybelle Planète.

Le cœur du projet Cybelle Planète est la protection de la biodiversité. Pour cela, vous avez choisi l’écovolontariat et les sciences participatives. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

Cybelle Planète est une association d’écologie participative, c’est-à-dire que nous proposons des moyens d’agir concrètement en faveur de la biodiversité. Nous travaillons suivant deux axes principaux :

– L’écovolontariat : il s’agit de tourisme volontaire. Nous proposons des solutions de voyages participatifs au sein de programmes de conservation existants, que ce soit des projets menés par nos partenaires ou par nous-mêmes. Pour en savoir plus : www.cybelle-planete.org.

– Les sciences participatives : nous avons mis en place un programme de recherche pour le suivi de l’état de santé de la biodiversité marine méditerranéenne : Cybelle Méditerranée. Le programme Cybelle Méditerranée se base sur la contribution bénévole d’amateurs, plongeurs ou plaisanciers, pour effectuer, sans formation préalable, des observations en mer. Des méthodes d’observation simples et précises ont été établies par des spécialistes et des scientifiques. Les informations collectées sont restituées par les contributeurs sur notre site web, et viennent s’ajouter à une base de données qui est mise à libre disposition de la communauté scientifique et des gestionnaires. Pour en savoir plus : www.cybelle-mediterranee.org

Les données récoltées par les amateurs sont-elles suffisamment fiables pour, ensuite être exploitées par des scientifiques ?

Les sciences participatives sont utilisées dans des programmes de recherche depuis plusieurs décennies. Le succès de telles initiatives n’est plus à démontrer. Pour mettre en place le programme Cybelle Méditerranée, nous nous sommes basés sur ces expériences antérieures. Une commission scientifique composée d’une vingtaine de spécialistes a contribué aux réflexions pour la mise en place de méthodes de comptages simples et faciles d’utilisation, permettant d’obtenir des données valorisables scientifiquement. Il ne s’agit pas de remplacer le travail de précision des chercheurs, mais d’effectuer, grâce à un grand nombre de contributeurs, un suivi à grande échelle et à long terme, ce qui est matériellement impossible à réaliser par une personne isolée.
En ce qui concerne les différents projets d’écovolontariat que nous proposons, nous tenons absolument à ce que l’aide des écovolontaires soit réellement valorisable. Que cette aide soit simplement matérielle ou qu’elle permette de générer des résultats scientifiques. Cela fait partie des critères déterminants pour le choix de nos partenaires.

Avec quels partenaires travaillez-vous et sur quels programmes de recherche portez-vous vos efforts ?

En ce qui concerne nos projets d’écovolontariat, nous travaillons avec plusieurs partenaires :
– le réseau Ecovolunteer international. Nous avons sélectionné certains projets de ce réseau, en fonction de nos critères d’éligibilité;
– diverses organisations/ONG qui agissent localement comme EcoBénin ou CPN-LOHUI.
– nous organisons également nos propres projets en mer méditerranée pour l’étude des cétacés.

De manière générale, tous les programmes que nous proposons concernent des projets en lien avec la préservation de la biodiversité. Chaque projet est soigneusement évalué avant d’être proposé à nos adhérents. Nous avons mis en place une grille d’évaluation stricte qui prend en compte à la fois la qualité scientifique du projet et l’utilité des écovolontaires, et les critères environnementaux, sociaux et économiques.

Vous menez de nombreuses études sur les dauphins et les baleines. Quelle est l’état de santé de la population des cétacés en Méditerranée ?

Dans le cadre du projet d’écovolontariat pour l’étude des cétacés en mer méditerranée, nous participons depuis 5 ans à la collecte de données sur ces populations. Ces dernières sont utilisées dans plusieurs programmes de recherche, dont le programme Cybelle Méditerranée, et sont principalement analysées par l’institut EcoOcéan, spécialisé dans le domaine. Les dernières publications indiquent que les populations de cétacés sont sensibles aux variations de température de l’eau, directement liées à la météorologie. Il semble également que l’activité humaine, et notamment le trafic maritime, poussent les cétacés de plus en plus loin de nos côtes. Compte tenu de l’influence grandissante de l’activité humaine sur la nature, ces premiers résultats sont une motivation supplémentaire pour continuer notre action. Grâce à la contribution des écovolontaires, nous participons à une véritable veille de l’état de santé des populations de cétacés et, si cela s’avère nécessaire, nous pourrons tirer la sonnette d’alarme.

Quel est exactement le rôle des écovolontaires ?

Suivant les projets auquel ils participent, le rôle des écovolontaires est variable. Il peut s’agir, par exemple, de participer à des repérages d’animaux sur le terrain (dans la brousse, en pleine mer), ou d’aider à soigner des animaux recueillis dans des refuges. Dans tous les cas, les écovolontaires contribuent concrètement à des programmes de préservation de la biodiversité. Sur notre site, il est possible, pour chaque projet, de télécharger une documentation complète décrivant le programme suivi et les activités auxquelles l’écovolontaire participera.

Suivant les possibilités ou la motivation, certaines personnes vont pouvoir partir quelques semaines, et d’autres quelques mois. Cela aura une influence sur le rôle qu’elles auront à jouer sur place. Dans tous les cas nous faisons notre possible pour que leur participation soit réellement utile.

Comment définiriez-vous l’écovolontariat ?

L’écovolontariat est une activité de tourisme volontaire. L’écovolontariat se développe largement en France ces dernières années et sous de multiples formes. Aucune définition « Officielle » n’a encore pu être proposée ; pourtant beaucoup d’organismes ou de personnes ont essayé de donner la leur, sans réelle concertation avec les différents protagonistes. Il suffit d’effectuer une recherche sur internet pour s’en rendre compte.

Je ne veux donc pas imaginer moi-même une énième définition, mais en me basant sur les travaux de recherche et les définitions existantes j’ai trouvé quelques éclaircissements sur le sujet.

Le terme écovolontariat est issu de l’anglais « ecovolunteering », car ce mode de voyage est issu d’une longue tradition anglo-saxone. On parle alors de tourisme volontaire : « volunteer tourism ». Depuis les années 1970, le volontariat s’ouvre à la conservation et à la préservation de la nature, le terme « Ecovoluntering », en français Ecovolontariat, est né.

Associer le terme « écovolontariat » à celui de « tourisme » est encore tabou en France. Pourtant, il s’agit bien de voyage et de loisirs, et les écovolontaires ne sont pas rémunérés ! Reste la question de l’argent : l’écovolontariat n’est pas nécessairement bénévole, tout dépend du projet, des besoins, et des prestations proposées. Dans le cadre de Cybelle Planète, nous proposons des voyages d’écovolontariat payants. La répartition des frais des écovolontaires est clairement détaillée sur notre site, nous restons transparents à ce sujet.

L’écovolontaire qui s’engage avec Cybelle Planète participe financièrement au projet. Quelle est la répartition de cette participation ?

Nous souhaitons rester dans une démarche solidaire et assurer aux écovolontaires que leur contribution financière aide directement les projets auxquels ils participent. En moyenne, 70% de la participation financière des écovolontaires est reversée au projet, cela va couvrir les frais nécessaires à leur hébergement et leur encadrement, une partie sera également allouée au programme lui-même (entretien, achat de matériel….). Les 30% restant sont dédiés au fonctionnement de Cybelle Planète et à un fond de développement pour le programme Cybelle Méditerranée.

Quel message souhaitez-vous passer aux futurs écovolontaires ?

Tout le monde ne peut pas se consacrer à 100% pour la planète car cela demande souvent à faire d’énormes concessions. Pourtant, nous souhaitons tous aider à préserver la biodiversité. L’écovolontariat est une manière d’agir pour la planète, tout en passant des vacances utiles et enrichissantes. Cela représente une solution simple et concrète, il n’y a qu’à se décider à faire le pas !

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